Pour débuter cette chronique, je vais vous exposer le problème existentiel auquel je suis confrontée. J'ai une tendance aiguë à remettre au lendemain ce que je pourrais faire le jour même. Par conséquent, je me retrouve à écrire un article conseillant vivement une exposition qui est déjà finie. Puisque j'ai attendu moi même le dernier week-end pour m'y rendre.
J'en suis désolée et je m'engage solennellement à contrer ma nature profonde. L'expo, que je devais donc vous conseiller, est celle d'Arman au centre Georges Pompidou. Bien évidemment, quelques unes de ses oeuvres se trouvent dans les collections permanentes du musée et rien ne vous empêche d'aller jeter un coup d'oeil à sa production sur internet.
Ce qui est assez passionnant dans cette exposition c'est la mise en perspective avec un courant de pensée et une époque très prolifique en terme d'art et de questionnement sur l'oeuvre et l'artiste. On pense notamment à Yves Klein qui a commencé avec ses happenings, son exposition du vide, à interroger le rôle de l'artiste dans la société avec l'aide de mécène tels que Iris Clert. Toute cette filiation, elle est là, bien présente dans cette exposition qui est aussi une sorte de témoignage sur ce qu'étaient les années 60 pour ces artistes. Je pense notamment à la série des portraits robots, accumulation d'objets racontant une personne. Pour Yves Klein, on notera son kimono de judo et une omniprésence de bleu ( le fameux bleu Klein IKB).
Dans la lignée des questionnements de Klein sur le vide, les premiers travaux d'Arman sont des compilations d'ordures, l'idée de saturer la galerie de plein. Arman travaille l'objet de consommation, l'accumule, le compile, le détruit, l'explose, le démultiplie, le déconstruit. Ainsi on retrouve des thématiques fondamentales la sérialité, la répétition, la société de consommation, la filiation avec d'autres mouvements (le cubisme et la déconstruction).
L'exposition organisée par thèmes rend compte des évolutions de sa pensée et de l'inscription de son oeuvre dans une démarche collective. Ses débuts de peintre avec des toiles abstraites où les objets se substituent au pinceau (tampons...) puis sa réflexion sur le plein avec les poubelles. Ensuite l'accumulation, répétition d'un objet de même type où la question de la série émerge. Question qu'il approfondira plus tard au sein de la régie Renault avec la production industrielle.
Cet objet sera dans un second temps malmené. Il réalise une série de colères, destructions d'objets organisées comme un cérémonial, en public. Ces performances laissent traces, donnent vie à une autre sorte d'objet et ne valent pas qu'à l'instant t. Par ailleurs, la manière de fracturer les objets est savamment étudiée, tout comme l'emplacement des explosifs et la manière dont répond ou se décompose l'objet.
Dans cette quête de déconstruction des objets, les séries de coupes constituent une autre étape qui débuta en 1961. L'objet est encore mis en scène, présenté tel un tableau en 3D avec un cadre. L'oeuvre n'est pas que conceptuelle, elle vous touche en tant qu'objet pas seulement en tant que démarche avec un sens de l'esthétisme certain. La progression de son oeuvre est tout à fait lisible et évidente dans cette exposition. Des questionnements récurrents qui vont l'amener à faire évoluer son oeuvre se dégagent et s'inscrivent clairement dans une époque qui a vu l'objet usuel acquérir ses lettres de noblesse.
Superbe expo que vous avez, je l'espère, pu voir. En tout cas, découvrir Arman fut charmant.
Superbe expo que vous avez, je l'espère, pu voir. En tout cas, découvrir Arman fut charmant.